Premier jour
M et A (enfin surtout A) avaient lancé l’idée de monter passer une nuit dans un refuge d’altitude dans un coin reculé de l’Ariège. La veille donc, nous avions un peu compris que l’aventure serait sportive puisque pour 10km étaient annoncés 1500D+ (et rien en D-) et que donc la pente serait conséquente par endroits.
En sortant d’Auzat, Direction Marc, on a rapidement bifurqué vers Artiès et Pradières par une toute petite route qui monte en serpentant dans les bois le long du Ruisseau d’Artiès. Rapidement, le bitume s’y dégrade et la route ressemble surtout à une piste africaine, des trous, des bosses, bref ça secoue pas mal. Mais les lieux sont magnifiques. En contrebas de la route, à Pradières d’en Haut, le parking nous attend. Une petite photo souvenir (au cas où certains ne reviendraient pas) avant de partir :
Le GR10 nous fait monter à travers de magnifiques sous-bois de bouleaux assez touffus où l’ombre est bien utile en ce jour ensoleillé d’août. Mais la chaleur liée à l’humidité rend la montée un poil pénible. Heureusement, l’Ariège est un pays d’eau. Elle suinte en de multiples endroits et les rivières, ruisseaux et rus descendent partout en grand nombre. Les cascades sont nombreuses et fournissent un fond sonore bien agréable. Les cours d’eau traversent, retraversent à n’en plus finir les chemins, et on y trempe les casquettes pour évacuer la chaleur. Des petites fleurs colorent le tapis du sol. Nous avons pris un petit repas par là. Un délicieux et très volumineux sandwich acheté à La Mie Dorée à Tarascon-sur-Ariège (une petite astuce qui en vaut le coup). Nous ne saurions d’ailleurs vous décourager d’y prendre la «chocolatine aux myrtilles», un plaisir simple mais qui se révèle grandiose aux papilles.
Une fois montés vers 1400m on sort du bois et c’est désormais à découvert qu’on évoluera. Là, le chemin monte à travers des pentes herbeuses. On traverse un petit coin de paradis où, à Ran d’en Bas, deux Orris nous attendent (cabanes de pierres plates où les bergers s’abritaient) :
La suite n’est pas particulièrement jolie, les 100 derniers mètres nous conduisent au barrage de l’Étang d’Izourt. L’eau et la montagne permettent à ce pays de s’alimenter assez facilement en électricité. En arrivant, une stèle en mémoire des ouvriers décédés emportés par une terrible avalanche lors de la construction du barrage nous accueille et l’Étang se découvre soudain. C’est un déversoir de dizaines de ruisseaux tous plus bruyants les uns que les autres, surtout ceux du fond qui ont un débit impressionnant et jettent leurs eaux en de longues cascades. L’eau est presque turquoise et la légère brise y fait quelques frises en surface. Quelques promeneurs se prélassent sur les berges. Une belle récompense de promenade.
Une fois un peu de repos pris, nous prenons le GR 10A par l’est pour contourner le lac. Le chemin est étroit et quelques petits à-pics peuvent impressionner. C’est par-là que D a commencé à prendre peur (cela ne se contrôle pas) ce qui compliquât sa poursuite jusqu’à la fin. De l’autre côté l’Étang avait encore d’autres teintes, et les ruisseaux un débit très impressionnant. Nous avons pris un petit goûter avant les deux montées infernales qui nous attendaient.
Une fois le ruisseau de l’Orri de la Caudière, qui descend très bruyamment, traversé nous voilà en bas. Un joli 300m face à la pente bien sévère. Ici le sol est couvert de Myrtilles sauvages dont nous nous gavons allègrement. Les amateurs apprécieront. La montée est parfois difficile, de grandes marches sont à gravir, le chemin est très étroit, l’humidité rend glissant le sol par endroits, la végétation masque le chemin… L’effort fait bien chauffer les cuisses. Déjà là, D souffre mais A l’encourage paisiblement aidé de sa patience légendaire.
En montant, les nuages s’amoncellent sur les hauteurs et le soleil nous quitte. La petit vallée de l’Orri est magnifique. On traverse le ruisseau de la Caudière sur un petit pont de bois pour rejoindre la dernière montée, un foutu 400m bien technique et bien pentu qui serpente dans les barres rocheuses. On ne le devine même pas en regardant la face. D était plus que non rassurée et tétanisait parfois. La fin lui fût pénible, mais son courage l’emportât.
Une fois le col passé sous les Hommes de Pierre, nous progressons dans les nuages denses. On devine le petit Fourcat en contrebas mais le refuge était invisible, sauf par intermittence lorsqu’un trou dans les nuages nous laissait l’apercevoir sur son promontoire, perché à 2450m, entre les deux Étangs Fourcat :
C’est Guillaume le gestionnaire du refuge qui nous accueillat avec sympathie. C’est une connaissance d’A (le CAFMA rapproche les gens) qui lui a monté une petite de réserve de Nesquick qui lui manquait. Nous prenons place dans notre chambre, une douche bien méritée et, le soleil ayant fait sa réapparition nous profitons du beau temps de la fin de journée autour d’une bonne bière (Val d’Ax) :
Le repas du soir a été englouti dans son intégralité, il faut dire qu’A possède un ventre sans fond. Guillaume nous avait concocté de quoi nous ressourcer : soupe curry, rougail-saucisse, fromage et crème brûlée. Simple mais délicieux, et pas seulement parce que nous avions faim, Guillaume est un cuisinier de bonne facture :
Alors le soleil s’est couché et nous avec :
Second jour
La nuit a été reposante, même si l’altitude a un peu perturbé le sommeil. J lui, s’est levé à l’aube réveillé par les premières lueurs. Il s’est alors armé de son appareil, d’un peu de courage et de patience pour voir le soleil émerger au dessus des cimes. Il faisait un peu frais, le ciel promettait une belle journée mais le vent soufflait pas mal. Guillaume l’apercevant depuis la fenêtre de ses cuisines, se prît de lui causer un peu. Le spectacle tint ces promesses. Les roches se parèrent alors d’un joli ocre et les étangs Fourcat révélèrent leur bleu profond :
L’équipe fût la dernière à se lever. Le petit déjeuner avalé, les adieux au refuge furent fait et la troupe se mît en marche pour redescendre par une variante du GR T64, par l’est. Il faut d’abord descendre au bord de l’étang par un petit goulet, suivre la berge et traverser son déversoir secondaire, grimper légèrement pour passer par une fenêtre et verser sur une autre vallée.
La descente dans la vallée est assez technique, il faut les mains et viser juste par endroits. La pente est rude mais le spectacle magnifique. Des avalanches de roches descendent de presque tous les sommets comme des langues de pierres. Des oiseaux chantent et au loin nous entendons les cloches de quelques brebis. Elles s’abreuvent au loin autour d’une grosse flaque à mi-pente.
Il fait déjà chaud alors même que le soleil n’arrose pas encore toutes les pentes. Une fois en bas de la cheminée il faut traverser en dévers des amas rocheux et suivre bon gré malgré le GR (heureusement les balises ne manquent pas, mais il faut ouvrir l’œil parmi toutes ces roches). La progression n’est pas toujours aisée. On rejoint alors un petit étang alimenté par celui de la Goueille de l’autre côté du col. L’aire est magnifique et tranquille. On en profite pour s’alimenter un peu.
Il faut alors remonter un peu, une centaine de mètres, pour basculer vers la vallée des étangs de Petsiger surplombée du pic de l’Aspre. Du haut elle promet et, en bas ne faillit pas à sa promesse. La série de 4 étangs (et leurs «annexes») est alimentée depuis le haut par un petit ruisseau qui arrivé en bas forme de magnifiques méandres dans l’herbe et la tourbe. Un vieil orri est posé en bord mais semble ne plus être en service. En tous cas, nous avions vu la veille un hélicoptère monter la cabane en bois neuve qui se trouvait posée là maintenant. Le coin doit certainement être occupé assez régulièrement. Nous n’avons vu personne, et cela de toute la journée. Seuls au monde :
Une fois les étangs passés, il faut descendre en longeant le ruisseau de Petsiger qui dans le replat suivant forme encore de somptueux méandres. La descente n’est pas facile par endroits. Il y a de grosses marches, quelques à-pics, mais la vue est extraordinaire.
Une fois en bas, nous faisons une pause. J et M pour attendre A et D qui étaient bien en arrière. J en profite pour faire une mini sieste allongé dans l’herbe et révasser, le lieu est propice à la contemplation et la méditation. Une fois D et A arrivés, la faim se faisant sentir on décide de manger un morceau. Guillaume nous avait gentiment préparé de délicieux sandwichs de pain de seigle au jambon de pays et fromage local. Très bon, nous l’avons remercié de tout cœur, nous a-t’il entendus ?
Nous reprenons la route et là on aperçoit en contrebas l’étang d’Izourt qui annonce la (presque) fin de la petite aventure. C’est ce que nous avons cru. Car pour récupérer le chemin qui coupe en dévers par-dessus l’étang afin de rejoindre en trace directe le barrage, il faut descendre droit dans la pente par un chemin bien technique. Là, les cuisses ont chauffé et pour J la suite a été plus compliquée, son genou droit tenait mais faisait réapparaître son instabilité. Et les douleurs sont apparues petit à petit…
Au barrage M et J ont attendu D et A. D était un peu au bout du rouleau et la fin lui fût particulièrement pénible. Depuis le barrage nous avons admiré le site de la randonnée. À droite en haut, le passage vers le refuge et à gauche la descente depuis Petsiger :
Les 500D- à parcourir pour rejoindre la voiture se firent par le même chemin qu’à l’aller, agréable évidemment mais sans surprise.
Au final, le temps étant de la partie, cette randonné assez difficile (T3-T4) est très sportive : 1500D+ / 1500D- avec de bonnes parties techniques s’est révélée magnifique. Préparez vos cuisses…
De quoi s’amuser et admirer la beauté brute et sauvage des Pyrénées Ariégoises.
Lien :
Attention : le réseau mobile est absent sur toute la randonnée. Et même au refuge, l’installation locale étant inaccessible pour des raisons techniques au jour de la rédaction de cet article – Août 2021.